La vie et la destinée d'Aurobindo Ghose (1872-1950) sont très différentes de celles de Râmakrishna et de Râmana Mahârshi. Fils d'une riche famille de Calcutta, il fait des études complètes en Angleterre afin de devenir administrateur civil de l'Empire britannique. Pourtant, de retour dans son pays natal, il préfère s'engager dans les rangs de ceux qui luttent pour l'indépendance de l'Inde et préconise, à l'inverse de Gandhi, l'usage de la violence. Incarcéré, il vit en prison une expérience spirituelle qui lui fait comprendre l'inanité de tout ce qui n'est pas la quête de la Vérité. Dès sa libération, Aurobindo Ghose se réfugie à Pondicherry (alors comptoir français) et s'engage dans une ascèse solitaire dont il ne sort que pour délivrer un enseignement de type védântique à ceux qui commencent â se grouper autour de lui.
La petite communauté s'organise en âshram et des européens se mêlent aux hindous, pour l'entendre. Se sentant près d'être débordé par cette affluence, il confie la direction de l'âshram à une Française d'origine égyptienne Mirâ Alfassa-Richard qui devient donc « la Mère » de la Communauté. Lui?même se retire dans sa chambre et rédige de nombreux ouvrages où il expose sa doctrine. Ayant fait voeu de silence il ne communique avec ses disciples que par de courts billets où il répond aux questions qu'on lui pose. Aurobindo Ghose écrit aussi de longues lettres à des correspondants lointains et seule sa mort mit un terme à cette activité (très rare en Inde) d'écrivain « spirituel ».
L'originalité de la position d'Aurobindo (qualifié de Shrî, titre de révérence, par ses disciples) réside dans l'idée que l'on doit se préparer â une mutation prochaine de l'humanité grâce â des exercices appropriés : yoga « intégral », méditation, étude des textes sacrés, etc. L'individu ainsi transformé perçoit alors la lumière céleste (c'est-à-dire « suprahumaine ») qui descendra sur le monde à la fin des temps pour instaurer un nouvel Âge d'or. Au total, l'action de Shrî Aurobindo vise donc à la constitution d'une élite qui sera, en quelque sorte, le germe de l'espèce nouvelle (mutante) qui habitera le monde nouveau.
De telles visions rejoignent celles de l'Apocalypse de Jean mais restent fidèles à certains aspects du brahmanisme classique. Il semble d'ailleurs qu'à la fin de sa vie Shrî Aurobindo se rapprochait de plus en plus des positions du Védânta traditionnel, selon lequel 1e retour à l'Âge d'or ne se produira qu'après la dissolution de l'Univers, à la fin du KaliYuga. La Mère, quant à elle, allait plutôt dans le sens d'une préparation plus active à la constitution de l'élite.
Source : Supervielle.univers.free.fr
|