En l'absence de documents écrits, il est difficile d'appréhender les idées religieuses des Berbères de la haute Antiquité. Seules les découvertes de l'archéologie – position des corps, objets d'offrande, animaux de sacrifices – révèlent l'existence de rites funéraires à cette époque. Puis, par contact avec d'autres peuples et civilisations, vinrent s'ajouter aux cultes autochtones – parfois en s'y superposant – ceux de nombreuses divinités. De ces apports étrangers, le phénicien fut le plus durable. Longtemps après la disparition de Carthage, des Berbères continuèrent à adorer sous les noms de Saturne et de Junon Caelestis les divinités phéniciennes Baal Hammon et Tanit. Sans être mineur, l'apport romain fut sporadique, et se heurta à la résistance culturelle berbère. Tout autre fut l'influence du Christianisme. La position de Carthage au carrefour de l'Orient et de l'Occident, l'omnipotence à l'époque romaine du dieu africain Saturne, l'existence précoce en Proconsulaire (Tunisie) et en Numidie (Algérie) de communautés juives prosélytes préparèrent le terrain et frayèrent la voie au monothéisme chrétien. Le Christianisme
Le Christianisme se développa en Afrique plus tôt que dans les autres provinces occidentales de l'Empire romain. Dès la fin du Iie siècle, il compta de très nombreux adeptes. Un concile tenu à Carthage en 220 réunit 71 évêques; un autre, vingt ans plus tard, en groupa 90. Ce succès alla croissant malgré les persécutions répétées du pouvoir impérial; celle de Dioclétien, en 303-304, fut terrible, et beaucoup de chrétiens africains apostasièrent sous la contrainte. C'est à cette époque que naquit sous l'impulsion de Donat, évêque de Numidie, un mouvement que les historiens ont appelé «donatisme»; celui-ci revendiquait la pureté de l'Église et dénonçait les reniements de certains prêtres. Purement théologique initialement, ce mouvement évolua vers une opposition à la domination romaine. Cependant, l'évangélisation se poursuivit, dépassant parfois les limites géographiques de l'Empire romain. Toutefois, malgré des conversions tardives – comme celle des Garamantes, au sud de l'Atlas, vers 568-569 –, le Christianisme resta une religion principalement urbaine. L'islam
La conversion des Berbères à l'islam fut massive. Implantée d'abord dans les cités, la nouvelle religion gagna progressivement les campagnes, les plateaux et le Sahara méridional. En se convertissant à l'islam, les Berbères ne renoncèrent pas à leur esprit d'indépendance. C'est sur le terrain même de la religion qu'ils exprimèrent leur opposition aux Orientaux. Des deux grands courants dissidents nés des discussions à propos de la succession du Prophète, le chiisme et le kharidjisme, c'est ce dernier qui eut auprès des Berbères un grand retentissement. Austère et égalitaire, le kharidjisme ne manqua pas de les séduire. À bien des égards, et bien que né hors d'Afrique, le kharidjisme rappelle dans l'histoire de l'islam maghrébin le donatisme berbère de l'époque chrétienne. Par opposition, les kharidjites berbères, après des révoltes sanglantes, formèrent des royaumes indépendants tels ceux de Tahert et de Sidjilmasa. Au Xe siècle, les Ketama de Petite Kabylie constituèrent au profit du mahdi Obeid Allah un grand empire chiite (fatimide). L'orthodoxie (le sunnisme) ne triompha qu'à partir du Xie siècle; son succès fut l'œuvre d'autres Berbères: les Sahariens nomades Lamtouna d'abord, les montagnards Masmouda ensuite l'imposèrent définitivement. Avec l'avènement au XIIe siècle de l'Empire almohade, la dissidence religieuse ouverte fut bannie du Maghreb. Seul le kharidjisme, dans sa tendance ibadite, survécut au mouvement réformateur almohade. Du djebel Nefousa, en Libye, au Mzab, en Algérie, et à l'île de Djerba, en Tunisie, des communautés ibadites se sont maintenues jusqu'à nos jours.
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