Patrimoine  Spirituel  de l'Humanité


Jésus Christ :

Dans le monde gréco-romain, la prédication chrétienne s'est concentrée sur la question de savoir quel type de relation unit Dieu et Jésus-Christ. Les diverses réponses données à cette question peuvent être réparties en deux grands courants: celui de l'école d'Antioche, qui met l'accent sur l'humanité de Jésus, et, à l'extrême, aboutit à la négation de sa divinité; et celui de l'école d'Alexandrie, qui souligne la divinité de Jésus et peut conduire à la négation de son humanité. Lorsque le Christianisme est reconnu comme une religion autorisée dans l'Empire («paix de l'Église», 313 après J.-C.), les conflits entre les deux écoles deviennent des affaires d'État: les empereurs convoquent alors des conciles christologiques, chargés de formuler des dogmes acceptables pour tous.

Le concile de Nicée (325) affirme que «la nature du Fils est identique et consubstantielle à celle du Père». Celui de Chalcédoine (451) établit une distinction entre la nature humaine et la nature divine du Christ, tout en insistant sur l'unité des deux. Mais les difficultés subsistent, car les concepts de nature, de substance et de personne ne sont pas définis de la même manière par tous. Les deux autres conciles qui traitent encore du problème christologique (Constantinople II, en 553, et III, en 681) ne parviennent pas à empêcher que l'incompréhension s'installe à ce sujet entre l'Occident (Église latine) et l'Orient (Église grecque).

De la Réforme à nos jours


Pendant de longs siècles la théologie occidentale méditera, en particulier à partir du XIIe siècle, le sens de la formule de Chalcédoine: «Le Christ est une personne en deux natures.» Au moment de la Réforme protestante, au XVIe siècle, Luther réintroduit la question de la rédemption: comment l'homme peut-il être sauvé? Pour lui, Jésus-Christ est la face de Dieu tournée vers l'être humain, dans la faiblesse d'une incarnation qui va jusqu'à la mort. Il offre la seule possibilité de connaître Dieu et d'être sauvé par lui.

Le XVIIIe siècle consacre le point de vue anthropologique et l'approche rationnelle prônée par les Lumières, qui met en cause le fondement des christologies classiques. L'essor des sciences soulève le problème de la nature de la vérité contenue dans les textes bibliques. Cet examen critique aboutit au XIXe siècle et au début du XXe siècle à la prise en compte de la dimension historique des faits et des textes ayant suscité la foi chrétienne. Le problème christologique est alors repensé dans la perspective des rapports entre l'histoire et la vérité, l'histoire et la foi. Alors qu'un certain type de recherche s'épuise à retrouver les faits véridiques de la vie de Jésus ou les paroles réellement prononcées par lui, le théologien protestant Rudolf Bultmann (1884-1976) affirme que nous avons seulement accès au Christ de la foi, par lequel Dieu s'adresse à l'homme.

Les disciples de Bultmann défendent la possibilité d'atteindre le Jésus de l'histoire à travers le Christ de la foi. Tant la théologie catholique que la protestante considèrent aujourd'hui que la christologie n'est pas un obstacle mais un des chemins d'accès à Jésus de Nazaret. Grâce au dialogue ouvert avec les sciences humaines, le problème de l'homme, de sa relation possible avec Jésus-Christ et avec Dieu, est désormais partie intégrante de la réflexion christologique.

Suivant les confessions, les époques et les cultures, les chrétiens ont tendance à insister tantôt sur la divinité de Jésus-Christ, tantôt sur son humanité. Pour certains, le nom de Jésus-Christ signifie avant tout «Jésus est le Christ», celui qui, dès les origines, possède l'autorité et la souveraineté de Dieu lui-même; tout ce que Jésus a enseigné et accompli sur la Terre prend par là valeur d'absolu. Pour d'autres, Jésus-Christ signifie d'abord «le Christ, c'est Jésus, l'homme de Nazareth, le Galiléen; en lui Dieu incarne sa divinité et partage le sort des hommes. Les autres fois monothéistes – le Judaïsme et l'islam – ne confèrent à Jésus qu'un statut humain: pour elles, c'est un grand rabbin (ou enseignant), un grand prophète. Par ailleurs, depuis la sécularisation des sociétés occidentales, le personnage de Jésus a été jugé et parfois récupéré en dehors de toute foi en Dieu. Il est considéré tour à tour comme un moraliste, un révolutionnaire, un des précurseurs du pacifisme...

Exprimer l'unité de la personne de Jésus-Christ en maintenant et son humanité et sa divinité est donc le propre de la foi chrétienne. C'est par la figure de Jésus-Christ qu'elle affirme la possibilité de la rencontre entre Dieu et l'homme.


  
  
  


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