Simone Weil est née le 3 février 1909 à Paris, dans une famille juive non pratiquante. Elle est la sœur du mathématicien André Weil (1906-1998). Elle était de santé fragile et, de 1930 jusqu'à sa mort, elle éprouva de violentes migraines qui l'empêchèrent souvent de travailler. Philosophe et militante politique Élève très douée, elle passa son baccalauréat de philosophie en 1925, puis fut l'élève du philosophe Alain au lycée Henri-IV. Elle découvrit à cette époque Karl Marx, dont elle lut le Capital. Reçue à l'École normale supérieure en 1928, elle s'y distingua par son activité politique en faveur du pacifisme. En 1931, elle fut reçue septième à l'agrégation de philosophie, et put dès lors professer la philosophie dans divers établissements scolaires de province. Cette même année, elle rencontra les militants syndicalistes révolutionnaires de la revue La Révolution prolétarienne, regroupés autour de Pierre Monatte et de Daniel Guérin. Elle donna plusieurs articles pour cette revue (L'Allemagne en attente, 1933), ainsi que pour Libres Propos, le journal d'Alain. Dès cette époque, elle se montra très critique à l'égard du marxisme, tout en se rangeant résolument du côté du monde ouvrier. À la fin de 1932, sa rencontre avec Boris Souvarine, communiste hostile à Staline, la renforça dans ses convictions politiques, à la fois opposées à la bourgeoisie et au stalinisme. L'arrivée de Hitler au pouvoir entraîna Simone Weil dans une réflexion approfondie sur le totalitarisme ; pour elle, «la bourgeoisie allemande devra accorder [à Hitler] une part sans cesse croissante de pouvoir, et finalement, peut-être le pouvoir total» (article de février 1933, Libres Propos). Réflexions sur les causes de la liberté et de l'oppression sociale (1934) En 1934, ccomposa son «grand œuvre», Réflexions sur les causes de la liberté et de l'oppression sociale, publié en 1955 dans le volume intitulé Oppression et liberté. À partir d'une idée profondément pessimiste – «Nous vivons une époque privée d'avenir» –, la philosophe ébauche une réflexion aux multiples aspects sur la révolution, mot qui «n'a aucun contenu», le progrès, qui «se transforme aujourd'hui, d'une manière à proprement parler mathématique, en régression», et la société en général, ou plutôt la collectivité, qui est désormais dominée par les machines et les choses. Simone Weil cherche à réhabiliter le rôle de l'individu, en qui elle voit le seul facteur contraire à la toute-puissance de la société : «Les causes de l'évolution sociale ne doivent plus être cherchées ailleurs que dans les efforts quotidiens des hommes considérés comme individus.» Mais, jugeant improbable une évolution positive, elle achève son analyse de l'oppression sur cette sentence : «Il semblerait que l'homme naisse esclave, et que la servitude soit sa condition propre.» Simone Weil ne parvient pas à donner à la suite de ses réflexions une coloration plus optimiste, malgré sa volonté de rechercher une voie vers la liberté ; elle ne découvre aucun moyen d'atteindre cette liberté, qui n'est qu'un rêve. La société la moins mauvaise est «celle où le commun des hommes se trouve le plus souvent dans l'obligation de penser en agissant», mais pour l'atteindre, il faudrait en finir avec le travail en usine, qui abrutit les ouvriers et domine l'activité humaine. On ne peut espérer diminuer le poids de l'oppression car les divers efforts en ce sens se contrarient les uns les autres. La dernière partie de l'ouvrage reprend une pensée de Francis Bacon : «L'homme commande à la nature en lui obéissant», que Simone Weil fait sienne en appelant l'homme à renouer «le pacte originel de l'esprit avec l'univers». Simone Weil annonce ainsi l'orientation mystique de sa pensée dans les dernières années de sa vie. Une vie intense et douloureuse Simone Weil se fit embaucher comme ouvrière en décembre 1934 par la société Alsthom, puis travailla encore chez Renault jusqu'en 1935, expériences douloureuses de la condition ouvrière. En 1936, elle passa un mois en Espagne au côté des républicains et des anarchistes, mais dut rentrer en France à la suite d'une blessure accidentelle. Elle abandonna le pacifisme face au danger de guerre qui s'installait alors en Europe. Sur le plan religieux, elle évolua à partir de 1938 vers un mysticisme chrétien sans illusion ; pour elle, «le Christianisme est par excellence la religion des esclaves» ; les esclaves «ne peuvent pas ne pas y adhérer, et moi parmi les autres». Elle entretint une importante correspondance avec le père Perrin, qui l'encouragea à se convertir, ce qu'elle finit par refuser. Elle s'intéressa également à la religion hindouiste, apprit le sanskrit et lut laBhagavad Gita. L'entrée du monde dans la guerre la conduisit à une analyse du rôle de la violence dans l'histoire (Quelques réflexions sur les origines de l'hitlérisme, 1939, publié en partie en 1940). Devant l'avance allemande, elle trouva refuge à Marseille de septembre 1940 à mai 1942, puis aux Etats-Unis. Enfin, en novembre 1942, Simone Weil décida de rejoindre la France libre en Grande-Bretagne. Mais elle ne put s'entendre avec les gaullistes, qui ne surent comment employer ses compétences et refusèrent de la parachuter en France ; elle rompit avec eux en juillet 1943. Souffrant de malnutrition et de tuberculose, elle fut hospitalisée à partir d'avril 1943, et mourut le 24 août au Grosvenor Sanatorium d'Ashford.
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