Petit-fils d'un éminent maître talmudiste auprès duquel il passe sa jeunesse en Galicie, Buber poursuit des études de philosophie et d'histoire de l'art à Vienne et à Berlin. Il subit l'influence des écrits et du mysticisme de Nietzsche et, plus tard, de la pensée de Kierkegaard. Mais c'est l'enseignement des hassidim qui le modèle durablement : en 1907, il publie les Contes de Rabbi Nachman, en 1908, la Légende du Baal Chem Tov et, plus tard, les Récits hassidiques (1949), recueils dans lesquels s'exprime son entière adhésion spirituelle au hassidisme, compris comme l'un des éléments fondamentaux du Judaïsme. Par ses écrits et son engagement personnel, Buber a largement contribué à la reconnaissance du hassidisme comme grand mouvement mystique mondial.
Le sionisme Rallié dès 1898 au sionisme, dont il constitue une figure éminente, Buber prône le retour des juifs en Palestine, mais estime nécessaire de forger un nouvel humanisme proprement judaïque, par une profonde et résolue renaissance spirituelle et culturelle. Cette aspiration s'exprime par sa participation active aux congrès sionistes, en particulier celui de 1922, où il se prononce en faveur d'un dialogue constructif avec les Arabes. Sa carrière comporte un important travail d'éditeur – avec les magazines Die Welt (1901), Jüdesher Verlag (1909) et surtout l'organe sioniste Der Jude (1916-1924). Il donne des cours sur la pensée juive à l'université de Francfort-sur-le Main de 1923 à 1933. Convaincu de la valeur sociale du Judaïsme, en particulier par la fraternité dans les communautés, Buber concrétise cette foi chaleureuse et pacifique dans Gog et Magog (1941), tableau du hassidisme polonais, et surtout dans les Chemins de l'Utopie (1949). Une relation directe entre l'homme et Dieu Interprète du hassidisme, traducteur en allemand de la Bible, Buber a élargi son Judaïsme jusqu'à l'universalisme d'une philosophie de la rencontre et du dialogue. Dans son œuvre majeure, le Je et le Tu (1923), il expose ainsi un existentialisme religieux qui vise à la connaissance de l'être humain non par la dissociation et l'étude de chaque élément de la relation «je» et «tu», mais par la relation «je-tu». Il distingue également le «Je-Vous, Dieu», qui n'est plus, comme dans le cas précédent, un dialogue entre soi et les autres, mais un monologue direct avec l'Éternel. Dès lors, il s'agit pour l'homme de rechercher Dieu «dans l'intervalle même qui nous sépare les uns des autres». Buber affirme – comme dans la Bible – la nécessité d'une relation directe entre l'homme et Dieu, essence même, selon lui, du Judaïsme biblique, et la soumission à Sa volonté. Cette relation échappe à la critique philosophique, laquelle ne se fonde jamais que sur le «je-tu». Cette philosophie est développée dans Dialogue (1932), Question à l'Unique (1936) et la Vie dialogique (1962). Elle a influencé nombre de penseurs religieux, surtout protestants, tels Karl Barth, Emil Brunner, Paul Tillich et Reinhold Niebuhr. En 1938, Buber dut fuir le nazisme et s'installa en Palestine, où il enseigna à l'université hébraïque de Jérusalem. Après la création de l'État d'Israël, il fonda et dirigea l'association Ihud (Unité), au sein de laquelle il poursuivit inlassablement ses efforts de rapprochement avec les Arabes. Il écrivit dès lors en hébreu, dans une langue pure, riche et imagée (l'Enseignement des prophètes, 1942). Les écrits de Buber explorent de nombreux domaines. Sa remarquable traduction de la Bible en «allemand hébraïque», commencée avec Franz Rosenzweig en 1925, sera terminée en 1961. En 1952, Buber reçut le prix Goethe ; en 1962, le prix Bialik et, en 1963, le prix Érasme pour sa contribution au patrimoine culturel et social de l'Europe. Les dernières années de sa vie furent consacrées à l'assistance culturelle, sociale et spirituelle des membres des kibboutz et à des travaux d'exégèse de l'Ancien Testament.
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