|
P
arce qu'on a porte du pain, du linge blanc, A quelque humble logis sous les combles tremblant Comme le nid parmi les feuilles inquietes; Parce qu'on a jete ses restes et ses miettes Au petit enfant maigre, au vieillard palissant.
Au pauvre qui contient l'etemel tout-puissant; Parce qu'on a laisse Dieu manger sous sa table, On se croit vertueux, on se croit charitable ! On dit: je suis parfait! Louez-moi; me voila ! Et, tout en blamant Dieu de ceci, de cela, De ce qu'il pleut, du mal dont on le dit la cause, Du chaud, du froid, on fait sa propre apotheose.
Mais tournez donc vos yeux vers la Mere Nature! Que sommes-nous, ceurs froids ou l'egoisme bout, Auprres de la bonte supreme eparse en tout? Toutes nos actions ne valent pas la rose. Des que nous avons fait par hasard quelque chose, Nous nous vantons, helas! vains souffles qui fuyons! Dieu donne l'aube au ciel sans compter les rayons, Et la rose aux fleurs sans mesurer les gouttes; Nous sommes le neant; nos vertus tiendraient toutes Dans le creux de la pierre ou vient boire l'oiseau.
Cest un reve de croire Que nos lueurs d'en bas sont la-haut de la gloire; Si lumineux qu'il ait paru dans notre horreur, Si doux qu'il ait ete pour nos coeurs pleins d'erreur, Quoi qu'il ait fait, celui que sur la Terre on nomme juste, excellent, pur, sage et grand, la-haut est l'homme, C'est-a-dire la nuit en presence du jour: Son amour semble haine aupres du grand amour; Et toutes ses splendeurs, poussant des cris funebres, Disent en voyant Dieu: Nous sommes, les tenebres!
Et d'ou sortez-vous donc, pour croire que vous etes Meilleurs que Dieu, qui met les astres sur vos tetes Et qui vous eblouit, a l'heure du reveil, De ce prodigieux sourire, le soleil !
|
|