Les soufis, dont le nom provient de la robe de laine blanche (souf ou çouf) que portaient les premiers mystiques, sont les membres mystiques de l'islam. Le soufisme constitue la doctrine ésotérique (tasawwouf) de l'islam, par opposition à sa partie exotérique, la chariya. Les mystiques de l'islam Il semble que le soufisme soit apparu spontanément dans les pays gagnés par l'islam, et le prophète Mahomet lui-même offrait le modèle du mystique lorsqu'il se retirait pour s'abandonner à Dieu. Certes, des influences chrétiennes ou hindoues ont pu s'introduire. Les premiers soufis recherchaient avant tout une règle de vie, un itinéraire spirituel pour aller vers Dieu.Les premiers groupes s'organisèrent à Koûfa et à Bassorah dès le VIIIe siècle, puis à Bagdad au IXe siècle. De la longue liste des soufis on peut distinguer Hasan al-Basri (mort en 772); Rabiyah, l'ancienne joueuse de flûte devenue sainte (morte en 801); Al-Djounayd (mort en 910); Al-Hallâj, qui connut le martyre à Bagdad en 922, ce qui témoigne de la rupture survenue entre l'orthodoxie et le soufisme; Al Ghazzali (1058-1111), qui parvint à inscrire le mysticisme dans l'orthodoxie; puis Djalal el-Din Roumi (mort en 1273) et l'Andalou Ibn Arabi surnommé Ech Cheikh al-Akbar («le plus grand des maîtres spirituels») (1165-1240).Les soufis appuient leur expérience sur deux versets coraniques: III-31 «Dis-leur: Si vous aimez Dieu, suivez-moi, il vous aimera et vous pardonnera vos fautes»; et V-54 «Oh vous qui croyez! s'il en est parmi vous qui renient leur religion, certes Dieu suscitera d'autres hommes qu'il aimera et qui l'aimeront.» Les soufis estiment que la clé du mystère divin est l'amour: aussi, contrairement aux tenants des doctrines rationalistes, les soufis se laissent guider par leur sentiment. Cherchant Dieu par un contact intérieur et mettant au centre de leur vie l'amour de Dieu et de l'homme, les soufis se heurtent à l'orthodoxie, qui proclame l'inaccessibilité de Dieu.
Le témoignage et l'existence du soufisme On décèle généralement deux moments dans l'histoire du soufisme: les premiers soufis développèrent l'«Unicité du témoignage» (wahdat al Shouhoud) fondée sur le dialogue entre le cœur du mystique et Dieu. Cet échange conduit à la rencontre, à l'identification avec Dieu, à l'anéantissement de la conscience personnelle (Fanâ), à ce «Je» qui valut à Al-Hallâj sa condamnation. Plus tard, on développa l'«Unicité de l'existence» (wahdat al Woujoud), où s'expriment des influences néo-platoniciennes: tout comme le monde terrestre n'est qu'un miroir de l'existence divine, l'esprit humain n'est qu'une incarnation de Dieu. Ce soufisme conduit ainsi au monisme, système philosophique (illustré par Spinoza) selon lequel il n'existe qu'une seule réalité.
Les adeptes du soufismeLe soufisme est intimement lié aux confréries. Ses adeptes appartiennent à une Tarîqah («sentier»), une confrérie dont les membres sont appelés faqir («pauvre») au Maghreb et darwech («derviche») en Orient. Les confréries constituent les maillons d'une «chaîne» initiatique qui s'est ramifiée depuis les débuts de l'islam. Elles portent le nom du fondateur et sont dirigées par un cheikh («vieux») qui initie les fidèles en leur transmettant sa barakah et leur enseigne le batin («sens caché») du Coran. Les rites diffèrent des rites de l'orthodoxie; ils sont constitués de chants en commun, de poèmes soufis, de danses rituelles et de l'invocation (dhikr) du nom d'Allah faite dans une cellule (khalwoua) pendant une durée souvent ternaire: trois jours, trois semaines, trois mois. Le soufi monte ainsi progressivement vers l'illumination, la «vision de Dieu». Le siège d'une confrérie est appelé zaouia («coin»); autour du cheikh se réunit un nombre variable de disciples. Le soufisme a ainsi conduit au culte des saints (wali, marabout).Le soufisme, qui a fleuri et s'est maintenu dans presque toutes les régions du monde islamique, sunnite et chiite, continue à être tenu en suspicion par un grand nombre de musulmans de l'orthodoxie.
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